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  • : Le blog des moniteurs et des élèves
  • : Un blog pour les moniteurs, mais aussi pour les élèves conducteurs, pour permettre aux premiers d'exercer enfin librement leur métier (leur art!), et offrir aux seconds un enseignement de qualité, à moindre frais, dans une relation de confiance et de liberté.
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16 mai 2011 1 16 /05 /mai /2011 15:37

 

Nombreux sont ceux qui ont regardé, jeudi soir 12 mai, ce reportage diffusé par "envoyé spécial" sur les conducteurs âgés, première victimes et premiers responsables (avec les néo-conducteurs), semble-t-il, des accidents de la route, du moins quand on tient compte de leur part dans la population des conducteurs.

Le choc est un peu rude de voir ces grands-pères ou ces grands-mères, parfois très âgés, avoir même du mal à s’arrêter à l'endroit qui leur est désigné du doigt ou de la main par les gendarmes, et encore plus de mal à s'extirper de leur voiture. Et encore plus rude quand on voit que faute d'une vue acceptable, d'une ouïe suffisante, ou encore d'une capacité convenable à se mouvoir, l’un ou l’autre est responsable de la mort d'un autre usager qui n'avait, de son côté, commis aucune faute ou imprudence particulière. Se pose alors le problème de la capacité physique à la conduite, à partir d'un certain âge...

 

En France, la capacité physique ou mentale à conduire un véhicule n'est pas vérifiée, ni avant l'obtention du permis de conduire, ni après. Et ce n'est que dans des cas particuliers que cette capacité fait l'objet d'un contrôle, comme, par exemple, pour les conducteurs de transports en commun. Et encore, car on peut s'interroger sur la qualité de ce contrôle, qui permet de proroger presque indéfiniment les autorisations de conduire bien au-delà de 70 ans. Bien peu de gens, en effet, savent que leurs enfants partent en voyages scolaires dans des autocars conduits par des grands-pères dont les qualités d'endurance, ou la vision de nuit ne sont pas contrôlées in situ.

Il y a quelques années, une loi a failli être votée, qui aurait institué un examen médical des conducteurs tous les dix ans, et un contrôle tous les trois ans à partir de 70 ans. Mais le gouvernement de l'époque (c'était, sauf erreur, en 2003) avait brutalement battu en retraite, s’apercevant certainement que ce contrôle pouvait priver de leur permis de conduire quelques hauts personnages, et soumettant aussi à cette contrainte le président de la république de l'époque qui venait d'avoir 70 ans en novembre 2002... Et on en est resté là.

 

Tout le monde le sait ou l'imagine, les conducteurs âgés n'ont plus ni leurs yeux, ni leurs oreilles de leur jeunesse. Vieillir fait partie de la vie, et l'usure est un des privilèges de la vieillesse. De plus, comme nul n'a jamais su (en dehors des discours, des études, des colloques, des tables rondes, des rapports...) comment assurer ce fameux (et fumeux) continuum de la formation des conducteurs, ceux qui ont eu leur permis il y a maintenant quarante ou cinquante ans (ce qui est le cas du rédacteur de cette note) sont souvent bien en peine de déchiffrer les multiples et nouveaux panneaux qui ont été disséminés, souvent avec excès, sur les routes de France, au prétexte d'information et de réglementation. Qui a dit que trop d'information tue l'information, et que le mieux est l'ennemi du bien ? Et, pourquoi ne pas en parler, les gens de bonne volonté qui offrent des cours de remise à niveau n'ont parfois qu'une très vague notion de la différence qui existe entre faire bachoter des élèves de dix-huit ans pour leur faire réussir l'examen pratique du permis de conduire, et donner à des personnes pleines de bon sens, de bonne volonté, et riches d'une longue expérience les moyens simples pour améliorer leur sécurité quotidienne et celle des autres usagers – je pense à la façon de passer les sens giratoires à la mode "examen", particulièrement inadaptée à ce type de public.

 

Le problème n'est pas celui des vieux, ou celui de la sécurité routière, mais celui de la santé publique.

On ne peut considérer que deux attitudes : soit tout un chacun est naturellement apte physiquement et mentalement à conduire un véhicule et il n'y a rien à vérifier (même pas par la lecture d'une plaque minéralogique le jour de l'examen), soit la conduite requiert un certain nombre de capacités physiques et mentales qui doivent être vérifiées. C'est le cas pour tout conducteur de poids-lourd dont la carrière se fera à transporter des matériaux de construction, biens infiniment plus précieux que les femmes et les enfants qu'on trouve dans les voitures particulières.

On peut alors imaginer un système comparable à celui de certains de nos voisins comme la Suisse, présenté dans le reportage. Avant de passer l'épreuve pratique, tout candidat passerait une visite médicale : vue, ouïe, système cardio-vasculaire, qualité des réflexes, mobilité, et aussi prélèvement sanguin permettant de faire nombre d’analyses à titre préventif dans des domaines variés (taux de sucre, cholestérol, et divers marqueurs dont la liste m'échappe – je ne suis ni médecin, ni biologiste). Excellente occasion de déceler un certain nombre de situation cachées et potentiellement dangereuses (on dit qu'il y a en France 50.000 séropositifs qui s'ignorent), ou lutter contre des comportements particulièrement dangereux au volant (alcoolisme, drogues plus ou moins douces). Passer le permis, ce serait donc subir, pour son bien et celui des autres, un check up complet qui permettrait d'agir préventivement si nécessaire.

Tous les cinq ans, jusqu'à 50 ans, puis tous les deux ou trois ans, voire tous les ans au fur et à mesure de l'avancée en âge, une visite médicale de contrôle permettrait une surveillance sérieuse de l'état de santé des conducteurs, et globalement d'une grande partie de la population à moindre frais, la prévention étant toujours plus économique que les soins. Songeons, par exemple, aux dépistages systématiques de cancers qui peuvent être faits à cette occasion.

 

Évidemment, un tel système privera de leur permis de conduire un certain nombre de personnes qui "n'auront rien fait de mal", tout comme sont aujourd'hui privés de leur permis de conduire ceux qui ont commis des infractions graves ou à répétition.

Et il faudra bien trouver une solution à cet inconvénient dans une société qui a tout misé (bêtement, il faut bien le dire) sur la propriété et l'usage personnels de la voiture individuelle, ceux que la maladie ou l'âge privent du permis n'étant pas interdits ipso facto de déplacement. Les habitants des grands centres urbains imaginent mal en effet la vie dans ce qu'on appelle "les campagnes", ces lieux où ne passent pas les transports en commun, et où on est de plus en plus à une bonne heure à pied de la première baguette de pain, ou à une demi-heure de voiture du premier médecin ou du premier bureau de poste.

 

C'est là que pourrait intervenir la notion de transport individuel public, par opposition au transport individuel privé (la voiture de M. Toulemonde) et au transport en commun (bus, tram, métro, etc.). On peut dire également "taxi", mais vu sous un autre angle que celui de la limousine coûteuse à la puissance si souvent inutile qui n'a d'autre but que de se démarquer du "commun", du petit peuple qu'éclaboussent les roues du carrosse. Le taxi (à condition de sortir d'un statut qui sera bientôt centenaire, preuve de sa "modernité") peut devenir alors une alternative utile, efficace, souple, offerte à la disposition de ceux qui ont occasionnellement besoin d'un véhicule (et qui, souvent, ne parcourent pas plus que quelques milliers de kilomètres par an), à un prix qui de toutes façons ne peut être supérieur au coût réel de la voiture dont on est propriétaire mais dont on a un si petit usage...

Le développement volontaire et global d'une telle alternative à la voiture personnelle serait aussi le moyen de développer la profession de chauffeur, organisée sous forme associative ou coopérative, le but n'étant pas de dégager des bénéfices au profit d'un ou plusieurs investisseurs, mais d'offrir un service au plus juste prix tout en garantissant une rémunération à des professionnels qualifiés.

 

 

Bien entendu, tout cela est entre les mains des pouvoirs publics et du législateur. Quand le second aura trouvé à la fois le temps et le courage (il en faut, pour risquer de mécontenter les électeurs) de mettre en place ici ce qui fonctionne si bien là-bas, les premiers pourront alors encourager les initiatives locales qui offriront à la fois plus de sécurité et plus de sérénité à l'ensemble de la société, tout en lui permettant de substantielles économies.

 

Mieux pour moins cher, que demander de plus ?

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